Vous avez peut-être entendu parler du métavers, mais est-ce que quelqu'un l'utilise réellement? Les marques doivent-elles commencer à s'y intéresser? Pour répondre à ces questions, nous avons mené une enquête auprès de plus de 200 personnes au Québec.
Ce dont nous allons parler
Lorsque Facebook a changé son nom pour Meta fin 2021, le géant 2.0 d'Internet a clairement fait savoir qu'il se lançait dans le métavers et le Web3, la nouvelle génération d'Internet. Un an plus tard, il était déjà difficile d'échapper aux discussions sur le métavers. Ce mot a figuré dans le classement des mots de l'année du dictionnaire anglais Oxford. Chercheurs, consultants et journalistes se sont tous précipités pour appréhender ce nouveau concept.
Mais malgré le battage médiatique, le métavers n'en est qu'à ses débuts, et tant les consommateurs que les marques restent perplexes quant à son potentiel. Les petites et moyennes entreprises (PME) du Québec peuvent-elles déjà s'en emparer ou est-ce réservé aux sociétés disposant d'énormes budgets technologiques et commerciaux?
Pour en savoir plus, nous avons demandé à plus de 230 personnes au Québec ce qu'elles pensaient du métavers, comment elles l'utilisaient et ce qu'elles en attendaient. Dans cet article, nous examinerons les comportements et les stratégies de déploiement, et nous nous pencherons sur certaines des technologies sous-jacentes, comme l'intelligence artificielle. Dans la deuxième partie de l’enquête, nous nous concentrerons sur le métavers en relation avec le commerce électronique.
Vous trouverez la méthodologie employée au bas de cet article.
Qu'est-ce que le métavers?
Pour les besoins de notre enquête, nous avons défini le métavers comme suit :
L'idée même du métavers remonte aux années 90, mais le concept a connu une résurgence récente grâce à des nouvelles technologies qui sont toutes arrivées à maturité en même temps.
Gartner propose une approche très détaillée sur ce qu'est le métavers (article en anglais), ses composantes technologiques et de l'orientation qu'il pourrait prendre. Cependant, il serait sans doute utile, à ce stade, d’envisager plusieurs métavers dont certains aspects sont déjà connus. Il s'agit notamment d'espaces de travail virtuels, de mondes de jeux en ligne dans lesquels les gens "vivent" sous forme d'avatar numérique et interagissent avec d'autres personnages, ainsi que d'environnements basés sur la réalité virtuelle (RV) dans lesquels les utilisateurs évoluent, par exemple dans des répliques d'équipements complexes et coûteux dans la vie réelle, cette fois dans un contexte relativement peu risqué et bon marché.
Le saviez-vous? Plusieurs technologies fondamentales ont progressé au point de pouvoir construire les mondes en ligne qui constituent un métavers.
Les PME qui souhaitent en profiter doivent maîtriser les éléments suivants :
- L'intelligence artificielle (IA) a plusieurs rôles à jouer dans le métavers. Elle fait fonctionner les services automatisés et les personnages avec lesquels les utilisateurs sont susceptibles d'interagir, elle peut créer les édifices et les décors d'un environnement en ligne et sert à transformer le langage humain naturel en code intelligible par les machines.
- Les logiciels de réalité virtuelle permettent aux marques de créer des expériences immersives, souvent en association avec des équipements grand public comme les casques. Les utilisateurs ont accès à des mondes virtuels pour jouer, visiter les répliques numériques de lieux du monde réel ou assister à des évènements en ligne.
- Dans le monde numérique, marques et consommateurs pourraient vouloir un document fiable indiquant à qui appartiennent les biens virtuels. Cela pourrait aller des cryptomonnaies aux vêtements que portent leurs personnages numériques ("avatars"). Une plateforme de chaînes de blocs permet de justifier de la propriété en fournissant un enregistrement public et fixe ("immuable").
Un métavers peut rassembler des gens du monde entier pour échanger, travailler et apprendre. Un logiciel de formation en ligne n'a rien de nouveau en soi, mais le métavers offre de nouvelles possibilités de rendre ces expériences plus immersives et de les connecter à d'autres aspects de la vie numérique de chacun.
Le battage médiatique autour du métavers ne peut masquer les doutes des consommateurs
Près de la moitié des participants québécois (49 %) ont déclaré savoir exactement ce que le terme de métavers signifiait avant de voir la définition ci-dessus. Cependant, la confusion ou l'incompréhension autour du métavers demeure pour l'autre moitié des répondants : 29 % connaissaient le nom mais pas le concept, 12 % connaissaient le concept mais pas le nom. Seuls 10 % ont déclaré qu'ils ne connaissaient ni le nom ni le concept avant de participer à l'enquête.
Malgré la nouvelle orientation stratégique (et le nom) de l'entreprise à l'origine du réseau social le plus populaire du monde, les consommateurs interrogés dans le cadre de notre enquête ne sont pas certains de ce que le métavers pourrait leur apporter ni de la manière dont il se développera au cours des prochaines années.
Le sentiment général envers le métavers est mitigé. Une majorité des personnes interrogées (42 %) déclarent avoir un avis positif sur la question, mais beaucoup ont déclaré avoir un avis neutre (35 %) voire négatif (23 %).
Une large majorité (89 %) admet que le métavers perdurera, mais les personnes interrogées ne sont pas d'accord sur ce que cela signifie exactement. Plus d'un tiers des participants à l'enquête (38 %) pensent que le métavers gagnera en importance, mais uniquement pour un public restreint. Toutefois, 40 % des personnes interrogées estiment qu'il impactera la vie de tous dans une certaine mesure, tandis que 12 % pense qu'il aura un impact décisif sur tout le monde.
Pour certains utilisateurs potentiels, l'incertitude constitue un frein à l'accès au métavers. Parmi ceux qui ne l'ont pas encore utilisé mais qui s'y intéressent, certains invoquent principalement le manque de connaissances pour expliquer pourquoi ils n’y ont pas encore accédé. 36 % disent ne pas savoir comment y entrer, 20 % pensent que le métavers n'est pas encore au point et 8 % déclarent qu'ils ne sauraient pas quoi y faire.
Pourquoi les gens s'intéressent-ils au métavers?
Fin 2022, le métavers semble être peu répandu au Québec. Lors de notre enquête, seules 16 % des personnes interrogées déclarent y avoir accédé. Cependant le métavers suscite toujours beaucoup de curiosité : 47 % des personnes interrogées se disent intéressées, tandis que 37 % déclarent ne l'avoir jamais utilisé et ne pensent pas le faire à l'avenir.
Le métavers promet l'accès à une plateforme en ligne très flexible, mais les technologies pour en profiter n'en sont encore qu'à leurs débuts. Il existe donc de nombreux cas d'utilisation possibles pour les entreprises prêtes à expérimenter de nouveaux concepts commerciaux.
Plus d'un tiers (35 %) des personnes interrogées qui ont accédé au métavers déclarent avoir tenté l’expérience parce qu'elles aiment se tenir au courant des dernières tendances technologiques, et 24 % pour participer à un évènement ou à un jeu spécifique. 16 % d'entre elles ont déclaré être curieuses de l'essayer parce qu'elles en avaient entendu parler par des amis et 16 % l'ont utilisé parce qu'elles travaillent dans ce domaine.
Dans notre enquête, le jeu est l'activité la plus souvent citée parmi celles attirant les utilisateurs vers le métavers. C'est ce que déclarent 65 % des utilisateurs du métavers, devançant d'autres activités comme les interactions sociales (38 %) ou la participation à un évènement virtuel (22 %).
Les PME seront peut-être intéressées d'apprendre que près de la moitié de ceux qui ont accédé au métavers s’y sont rendus de manière ponctuelle, soit pour accéder à un jeu, à un évènement ou à un service spécifique. Ce qui laisse à penser que les utilisateurs du métavers ont besoin d'une raison impérieuse pour accéder à la plateforme, au-delà de l'attrait de la nouveauté.
Selon les données que nous avons recueillies, il semblerait que les utilisateurs de métavers en 2023 sont les pionniers classiques : ce sont des passionnés de technologie qui adorent tester de nouveaux produits, qui aiment jouer et sont prêts à dépenser de l'argent pour des biens virtuels. Leur vie sociale et professionnelle, qu'elle soit en ligne ou dans la réalité, peut les conduire vers le métavers parce que c'est là que les choses se passent : travail, communautés, jeux et évènements, tout au moins une partie du temps.
2023 sera-t-elle l'année du métavers grand public?
Jusqu'à présent, tous les participants à notre enquête ayant utilisé le métavers semblent l'apprécier. 54 % d'entre eux se sont déclarés plutôt satisfaits et 19 % très satisfaits de l'expérience, ce qui donne un taux de satisfaction globale de 73 %.
Mais pour répondre à la question de savoir si le métavers va se développer, nous devons nous pencher sur les 84 % des personnes qui ne l'ont pas encore utilisé.
Parmi les actuels non-utilisateurs qui s'intéressent toutefois au métavers, 66 % se disent simplement curieux, tandis que 36 % sont intéressés par des expériences uniques ou exclusives et 25 % y voient un lieu potentiel d'achat en ligne. Dans le même ordre d'idées, ce groupe serait davantage attiré par le métavers pour les voyages, les évènements et les sports que ne semblent l'être les utilisateurs actuels. En fait, les non-utilisateurs s'intéressent à une plus large gamme d'activités dans le métavers que les utilisateurs actuels qui s'intéressent essentiellement aux jeux.
Toutefois, d'après notre enquête, il semble peu probable que le métavers connaisse une forte augmentation du nombre d'utilisateurs. Parmi les 16 % qui l'ont utilisé, moins d'un tiers se décrivent comme "utilisant actuellement le métavers". Quels que soient les motifs pour lesquels les gens accèdent au métavers, ils n'ont pas l'air d'y rester. À moins que les chiffres n'augmentent de façon exponentielle, il semble peu probable qu'une majorité utilise le métavers dans un avenir proche.
En résumé
Les données de notre enquête suggèrent que le métavers souffre du paradoxe classique de l'œuf et de la poule. De nombreux utilisateurs se tiennent à l'écart de toute plateforme qu'ils ne comprennent pas vraiment s'ils n'ont aucune raison impérieuse de s'y intéresser. En même temps, les marques restent à l'écart parce qu'elles estiment que le public n'est pas assez nombreux pour leurs produits.
Les utilisateurs actuels ont tendance à venir sur le métavers pour des évènements ou des expériences ponctuels, mais leur taux de rebond est élevé. Les utilisateurs potentiels sont en revanche plus curieux et pourraient être attirés par des perspectives de socialisation, d'achat et de jeu.
Dans la deuxième partie de l'analyse des données de notre enquête, nous examinons comment les consommateurs perçoivent le métavers en tant que plateforme d'achat et comment les marques pourraient adapter leurs stratégies de commerce électronique avec le développement du métavers.
Méthodologie
Les données de GetApp ont été recueillies suite à une enquête en ligne réalisée en octobre 2022 auprès de 233 personnes résidant au Québec et âgées de 18 à 75 ans.
Pour participer à cette étude, les participants ont dû lire une définition du métavers et confirmer leur compréhension du concept en répondant à une question subsidiaire.
Les résultats sont représentatifs de l'enquête, mais pas forcément de la population dans son ensemble.